11. Règles et accords : un cadre pour vos relations
Ep. 11

11. Règles et accords : un cadre pour vos relations

Episode description

Est-ce que ça vous avez déjà eu l’impression qu’un ou une proche ne respectait pas un de vos besoins ? Ou de vous disputer avec un·e de vos partenaires parce qu’il n’avait pas conscience d’une de vos limites ? Ou tout simplement, de ne pas oser verbaliser une de vos envies vis-à-vis d’une de vos relations ?

Dans notre dernier épisode, on vous a donné quelques clés pour mieux identifier vos besoins, vos limites et vos envies, pour vous-même.

C’est une chose de les conscientiser pour soi, c’en est une autre que de réussir à les communiquer à ses proches et de respecter ceux des autres.

Alors maintenant, on discute de comment on peut construire une relation épanouissante et bienveillante, en communiquant autour de ces questions avec votre partenaire, vos ami·e·s, vos parent·e·s, etc. : comment poser un cadre relationnel ?

Ressources

Mentionnées dans l’épisode :

  • Le smörgåsbord, nom donné à un outil créé pour choisir les composantes d’une relation. L’outil ne semble pas avoir été traduit en français. Il est accessible en anglais, avec des variations différentes, ici ou .
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Adèle Bienvenue dans « À tes amours », le podcast qui propose une autre manière d’aborder les relations. Nous sommes Adèle,

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Alexia Alexia

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Sacha et Sacha,

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Adèle et nous allons vous parler notamment d’émotions, de communication, de polyamour et d’autres formes de non-monogamie. Ce podcast s’adresse à toute personne s’interrogeant sur les relations. Lorsqu’on relationne avec quelqu’un, quelle que soit la nature de la relation, qu’elle soit amicale, amoureuse, familiale ou sexuelle, deux personnes sont impliquées. Chacune a ses envies, ses besoins et ses limites. Chacune souhaite également respecter les envies, les besoins et les limites de l’autre. Dans notre dernier épisode, on vous a donné quelques clés pour mieux identifier vos besoins, vos limites et vos envies pour vous-même. Aujourd’hui, on souhaite aller un peu plus loin et voir comment on peut construire une relation épanouissante et bienveillante, en communiquant autour de ces questions avec votre partenaire ou vos amis, vos parents. Vous fixez des règles et des accords dans vos relations. Nous, on dira que vous délimitez le cadre de la relation. Dans un premier temps, on définit dans cet épisode ce qu’est un cadre, les règles et accords et pourquoi les établir, en particulier dans les relations non monogames. On partage ensuite nos témoignages sur comment on a mis en place des cadres dans nos relations et nos modes d’emploi pour le faire dans de nouvelles relations. Enfin, on échange sur la conduite à tenir lorsque le cadre n’est pas respecté ou si les besoins et limites de chaque personne entrent en conflit. Dans les débuts de mon exploration de la non-monogamie, je pense que j’avais des difficultés à percevoir ce que c’était que les besoins, les limites, les règles et les accords des relations. Et je me souviens que j’en discutais avec une autre personne et elle m’avait vraiment aidée en me donnant une image. Cette image, c’était de dire que chaque personne venait en fait avec son cadre, comme un cadre de tableau. Et délimiter, en fait, dans ce cadre, ce qu’il lui était possible d’apporter dans la relation. Que ce soit ses envies, ses besoins et ses limites. Et l’autre personne faisait pareil. Et en fait, il y avait une zone de recouvrement entre ces deux cadres. Et ça, c’était le cadre pour la relation entre les deux personnes. Et j’avoue que cette image, elle me parle bien parce que ça permet de prendre en compte mes propres besoins et envies et celles de mon partenaire. Est-ce que cette image vous parle ou comment vous définiriez finalement le cadre de relation ?

2:42

Alexia Je pense que pour moi, ça n’a jamais été très clair ou imagé. Et qu’il faut vraiment que je fasse un effort pour me dire… OK, effectivement, une relation, c’est deux personnes qui viennent avec leurs bagages et avec leurs attentes sur la relation. Et avec leurs croyances de ce que ça va être ou ce que ça doit être, la relation. Et en fait, qu’on le veuille ou non, on a une sorte de cadre de relation avec un peu n’importe qui. Le cadre de relation avec la boulangère, c’est on va lui dire bonjour, sourire, demander du pain. Et la boulangère, elle va nous demander de l’argent en retour et on part en disant merci, au revoir, quoi. Et voilà, du coup, pour moi, ça a un sens de parler cadre de relation dans plein de cas. Et en fait, sur la boulangère, ça va peu impacter notre vie. Sur une relation avec qui on partage énormément de choses, énormément de temps et énormément d’activités, ça va être plus impactant. Et ça peut être intéressant, effectivement, d’essayer de tirer au clair ce que c’est comme type de relation, presque.

3:37

Adèle Et toi, Sacha ?

3:39

Sacha Moi, je pense que le cadre, il est important principalement pour résoudre les problématiques soulevées par les attentes. C’est-à-dire que dans une relation qu’il va y avoir entre deux personnes, il va y avoir probablement assez vite des attentes qui vont se mettre en place. Je m’attends à ce qu’on se voit à telle fréquence, je m’attends à ce qu’il y ait de la sexualité, je m’attends à ce qu’il y ait… Que si tu es invité à une soirée tu vas m’inviter aussi… Tout un tas d’attentes qui sont plus ou moins implicites et qui d’ailleurs potentiellement viennent avec un modèle sociétal. Où on se dit ah bah dès qu’on commence à coucher avec quelqu’un et bien on s’attend à ce que tout l’escalator relationnel… Qui est concept dont on a déjà parlé, qui est l’idée que quand on couche avec quelqu’un après on va habiter ensemble et après on va se marier etc. Bon je simplifie un petit peu mais c’est pour expliquer rapidement. Donc toutes ces attentes-là, le cadre, il est utile pour dire… Attention, on se met dans une relation. Quelles sont tes attentes, quelles sont mes attentes ? Et quels sont mes besoins éventuellement, mais les attentes, c’est que je compte remplir ces besoins avec toi. Et donc le cadre, il permet de se dire, eh bien, on va faire en sorte que ces attentes-là, elles soient remplies, ces attentes-là, elles ne soient pas remplies par cette relation-là, voilà.

4:49

Adèle Vous parlez d’attente. Moi, je suis souvent confrontée à des personnes qui me disent qu’elles n’ont pas d’attente. Qu’est-ce que vous mettez finalement derrière ce terme ?

4:57

Sacha Je pense que c’est un petit peu faux de dire qu’on n’a pas d’attente. C’est-à-dire que… Je comprends un petit peu l’idée. Moi, aujourd’hui, si je démarre une nouvelle relation, je ne vais pas avoir d’attente parce que tous mes besoins sont comblés aujourd’hui. Et donc, je n’ai pas d’attente particulière avec une nouvelle personne pour me dire je m’attends à ce que tu répondes à ces besoins-là. Donc, d’une certaine manière, je n’ai pas d’attente. Mais par contre… Par contre… Si jamais je vois cette personne tous les jours, par exemple… Eh bien, finalement, je vais avoir l’attente de la voir tous les jours parce que c’est comme ça que… Y a cette habitude et donc l’attente, elle va être là, qu’elle ait été exprimée ou non. En fait, si je vois quelqu’un tous les jours, je vais m’attendre à la voir tous les jours et pas qu’il se passe tout à coup un mois sans la voir. Même si on l’a jamais verbalisé, même si on l’a jamais dit, même si… À partir du moment où en fait cette habitude elle est là, inconsciemment il va y avoir cette attente de se dire… Ouais bah ça a été comme ça jusqu’à présent donc finalement inconsciemment je m’attends à ce que ça continue de cette manière là.

5:57

Adèle Finalement, c’est presque ce que tu projettes, que ce soit conscient ou non. C’est ce que tu envisages dans la relation et ce dont tu as à la fois envie et besoin dans cette relation en particulier avec cette personne-là.

6:11

Sacha Hum.

6:12

Alexia Je pense qu’il peut y avoir un truc de méfiance aussi. Je sais que dans certaines relations, j’ai pu être en considérant que j’ai très peu d’attentes. Et je pense que c’est assez vrai. Il y a vraiment des relations où j’étais genre, j’ai envie de certaines choses, j’ai des envies, mais advienne que pourra. Et si ça ne se produit pas, je trouverai mon bonheur ailleurs. Et du coup, je pense que dans une certaine mesure, ça peut exister. Mais c’est peut-être preuve d’une sorte de vraie méfiance, pas forcément à l’égard du partenaire, mais à l’égard de la vie en général. Et ça peut arriver, d’avoir peu d’attentes, je pense.

6:47

Adèle Une forme de préparation à des éventuelles déceptions ou au fait que les choses ne puissent pas se faire pour x ou y raison. Ok, je vois. Vous avez verbalisé pourquoi vous pensiez qu’établir un cadre, ça pouvait être utile. Je suis d’accord avec vous sur le fait que dans les relations monogames, il y avait finalement un cadre prescrit. On en avait déjà parlé, la différence entre le prescrit et le décrit. Il y a aussi finalement tout ce qui vient en termes de projection avec l’étiquette du fait qu’on labellise qu’on est en relation. Et du coup, qu’est-ce qui va être finalement interdit ou autorisé par rapport à cette relation ?

7:22

Alexia Je voudrais insister sur le fait que j’ai l’impression qu’on a d’autant plus besoin de cadres dans des circonstances de changement. Où on passe d’une étiquette à une autre éventuellement. Ou dans le cadre d’une ouverture de couple, il y a un gros changement qui entre, qui fait que nos vies ne sont plus les mêmes. Et donc, il peut y avoir des changements d’attente qui viennent avec. Et c’est là, j’ai l’impression, où il peut y avoir particulièrement besoin de rediscuter de ce cadre. J’ai vu aussi des témoignages de moments où des couples allaient avoir un enfant, attendaient un enfant. Et en fait, dans ce contexte particulier, c’est vrai qu’on pouvait avoir un cadre très libre à un moment et en fait, on attend un enfant à un autre moment et du coup, on a… On veut être sûr qu’on est sur la même longueur d’onde, sûr comment on va gérer la grossesse, comment on va gérer l’arrivée de ce nouvel être. Et donc, j’ai l’impression qu’établir un cadre, c’est aussi sur ces moments de transition.

8:18

Adèle Oui, tu veux dire sur ces moments de transition, même… dans tous les modèles relationnels qui peuvent exister.

8:24

Alexia Ouais, et en l’occurrence, ce qui se passe sur la monogamie, j’ai l’impression, c’est que le cadre est très sous-entendu. Les gens ont une idée de ce que c’est censé être être en couple, et chacun a son idée et pense que tout le monde a la même. Et c’est plus ou moins vrai. C’est vrai qu’il y a des normes qui sont largement partagées entre les différentes personnes qui sont en relation monogame. Mais c’est pas forcément le cas tout le temps et j’ai l’impression qu’on assiste parfois à des surprises par rapport à… Ah oui mais ça en fait c’est inacceptable — mais non mais en fait c’est tout à fait normal et je vois pas le problème quoi.

8:58

Adèle Donc on a vu quelques raisons pourquoi on pouvait établir un cadre. Est-ce que pour vous il est toujours nécessaire ? Est-ce qu’il y a toujours besoin d’un cadre ?

9:09

Sacha Je dirais peut-être que dans l’absolu, on pourrait dire non, il n’y a pas toujours besoin. Mais en pratique, je pense qu’il y a un petit peu tout le temps besoin d’un cadre. Parce que pour moi, effectivement, dès qu’il va y avoir des attentes d’un côté ou de l’autre, c’est important d’en avoir. Par exemple, si moi j’ai des attentes et des envies, et donc du coup j’ai envie de, je ne sais pas, voir la personne deux fois par semaine… Eh bien c’est important de mettre un cadre pour se dire est-ce qu’on peut atteindre cet objectif ou s’en rapprocher. Sinon je vais être déçu et c’est un petit peu gênant. Ou inversement si moi j’ai pas de temps du tout à accorder à la personne… Pour anticiper les attentes de l’autre de dire : bon bah toi peut-être t’as des attentes là-dessus, mais moi mon cadre c’est que bah on va pas pouvoir se voir souvent et sache-le. C’est pas forcément quelque chose, des règles absolues. Mais en tout cas c’est important d’avoir une vision commune de comment se passe la relation. Pour moi, ça peut éventuellement plus être une vision que des règles strictes. Mais c’est important de s’accorder vraiment sur cette vision, sinon il risque d’avoir des grosses déceptions.

10:13

Alexia Ouais, je suis complètement d’accord avec ça. Je reprendrai un peu mon propos de tout à l’heure sur le fait que je pense vraiment qu’il y a des gens qui sont capables d’arriver avec très peu d’attente. Et du coup, ils sont là vraiment advienne que pourra, quoi. Il y a des moments où le cadre, il a besoin d’être parlé, discuté, explicité beaucoup. Il y a d’autres relations… Moi j’ai l’impression d’avoir des relations où le cadre n’est pas tant explicité. Mais on a quand même une discussion de fond sur nos envies, besoins, nos peurs, nos anxiétés ou je ne sais pas quoi. Qui fait qu’au final, je pense qu’il y a un cadre qui se constitue de façon implicite.

10:49

Adèle Je vous rejoins sur le fait que le cadre, il n’a pas forcément toujours besoin d’être strict. En fait, ce n’est pas un cadre qui doit être enfermant. Je reprends ma métaphore de mon cadre de tableau tout à l’heure. En fait, c’est probablement quelque chose de beaucoup plus évolutif et de beaucoup plus souple que ça. Parce que déjà, nos besoins, nos envies et nos limites, elles évoluent au cours du temps. On l’a vu. De la même manière, celles de l’autre en face vont également évoluer. Et finalement, le cadre de la relation, il va avoir des phases. Il va être parfois plus large, parfois plus restreint. Je trouve que c’est important de se garder une forme de liberté et une possibilité d’évolution dans ce cadre et dans ce qu’on fixe comme possible ou impossible dans la relation. Mais de mon côté je suis assez d’accord sur le fait que le cadre il existe qu’on le définisse ou pas. Qu’en fait il y en a un parfois implicite. Et j’ai de plus en plus tendance à préférer l’explicite que l’implicite et donc à vouloir discuter finalement de ce que je veux dans la relation et de ce que les personnes veulent. Quitte à dire « Bah en fait, là je ne sais pas trop. Je me sens juste bien avec toi. Je n’ai pas beaucoup de projections et j’ai envie de nous laisser la liberté d’explorer ce que ça va devenir. » Mais… Je trouve ça bien quand même de le verbaliser et de dire on est dans ce cadre où on accepte que les choses ne soient pas trop bornées et qu’elles évoluent et d’en rediscuter si jamais. Parce que ça ouvre la porte à la discussion je trouve de l’autre peut verbaliser ses besoins et ses envies, moi aussi je peux le faire. Et c’est quelque chose que je ne faisais pas du tout avant sur lequel j’avais des difficultés peut-être à m’exprimer. Et donc pour moi c’est particulièrement important d’essayer de le mettre à plat dès le début sur le fait qu’on peut verbaliser ce genre de choses dans la relation.

12:38

Sacha Oui, et je pense que même si le cadre est très flou, il n’est pas du tout évoqué, c’est important régulièrement de faire le point sur les attentes des personnes. Parce que même si en fait personne n’a besoin de rien, on suit le flot et puis tant que tout va bien, on est content. En fait, c’est important de se demander quelles sont les attentes des gens pour éviter… Pour éviter que tout à coup on se rende compte que en fait finalement… Ce qu’on fait comme ça en suivant le flot depuis deux mois sans jamais l’avoir dit c’est quelque chose dont finalement on s’attend à ce que ça continue.

13:11

Alexia Donc quand Sacha parle de flots, pour les gens qui nous écoutent, il faisait des mouvements de vagues avec ses bras et c’était assez rigolo.

13:18

Sacha Je pense aussi que c’est important de préciser que là, nous, on a pas mal parlé de cas où le cadre est très flou. Parce que je pense que c’est quelque chose qui, personnellement, à nous trois, est quelque chose qui nous correspond aujourd’hui. Mais il y a beaucoup de gens, et probablement la majorité, qui ont besoin d’un cadre qui est très strict. Et en fait, pour pas mal de gens, ça va être, notamment s’ils ouvrent une relation, etc., ça va être… « Oui, alors le cadre, c’est interdit de faire venir des gens dans notre appartement. Si on couche avec quelqu’un, c’est uniquement le dimanche soir. » Et des choses très précises. Et le cadre va être des choses extrêmement précises pour rassurer les gens, pour contrer les insécurités. On n’a pas parlé d’insécurité, mais je pense que le cadre peut aussi être un très gros outil pour aider pour les insécurités.

14:05

Adèle On a vu que parfois c’était nécessaire de discuter du cadre ou d’en établir un, notamment dans des moments de changement. Est-ce que vous avez des exemples de situations où vous avez dû mettre en place des cadres et comment vous vous y êtes pris ?

14:21

Alexia Oui, alors carrément, juste l’exploration des relations non monogames. Moi, je l’ai faite beaucoup avec Sacha. Et au départ, on avait un… Je grossis le trait, mais au départ, on était plutôt juste couple libre et pas en polyamour. On connaissait même pas le terme à l’époque. Et du coup, au moment où on a commencé à passer sur des trucs plus polyamoureux ou plus concrets… À chaque fois qu’il y a eu des étapes un peu nouvelles qui nous éloignaient de la monogamie… À chaque fois qu’on laissait tomber des exclusivités… Donc je parle des exclusivités comme on en a parlé à notre épisode Notion sur le sujet. À chaque fois que… C’était, — comment dire — insécurisant. Parce que ça nous faisait arriver sur un schéma qu’on connaissait pas du tout, dans lequel on n’a pas du tout grandi. J’ai l’impression qu’on m’a toujours dit « tu trouves ton prince charmant et en fait après vous vous aimez pour toujours. Et si ton prince charmant commence à avoir des émotions pour quelqu’un d’autre que toi, ça veut dire qu’il t’aime pas vraiment. » Et donc juste sur les conceptions générales de l’amour unique, sortir de ça… Quand bien même on commence à sentir en soi qu’on a nous-mêmes des sentiments pour plusieurs personnes… Ça reste très insécurisant de franchir les étapes, de découvrir de nouveaux modèles. Je pense qu’à chaque fois qu’on change de modèle, ça peut faire un peu peur. Et du coup, dans ce contexte-là de changement… Avec Sacha, il y a vraiment des moments où on s’est dit, ok, au départ… Alors je vais peut-être dire des bêtises, Sacha, tu peux me corriger. Mais je crois qu’au départ, on était là, genre, ok, on a le droit de pécho quelqu’un dans une soirée, mais pas les amis, quoi. Enfin, je crois qu’on avait des petites règles comme ça au début, quoi.

16:07

Sacha Oui, je ne sais plus si c’était cette règle-là exactement, mais en tout cas, on est parti d’un cadre qui était assez fermé. On l’a agrandi au fur et à mesure en disant, ah oui, finalement, on peut inviter des gens chez nous. Ah oui, on peut revoir une personne plusieurs fois. Ah oui, on peut tomber amoureux. Ah oui, on peut, etc. Et à chaque fois, on agrandissait un petit peu le cadre. On se rendant compte qu’on pouvait être à l’aise avec l’idée d’avoir plus de liberté au sein du couple.

16:36

Alexia Oui, je me souviens d’un petit détail qui m’est venu auquel je n’avais pas pensé auparavant. Mais en fait, quand on a commencé à dire qu’on pouvait accueillir des gens chez nous… Pour moi, c’était ultra important que si tu accueilles quelqu’un dans notre lit pendant que je ne suis pas là, quand je revenais, je voulais que les draps soient changés. C’était quelque chose qui était important pour moi. Et du coup, je te l’avais verbalisé et tu faisais bien attention à faire ça derrière. Et du coup, c’est marrant parce que c’est vraiment très pratique. C’est une petite règle pratique qui changeait beaucoup de choses pour moi.

17:02

Adèle Et du coup, en fait, vous aviez un cadre de départ, vous aviez des interdictions qui allaient avec ce cadre. Qui était au début implicite par la relation monogame, et que vous avez levé, finalement. Vous avez levé ces interdits en disant finalement ça on peut, c’est un peu ça ?

17:18

Alexia Ouais en gros ouais. Bah y’a eu des loupés en fait parce qu’on savait pas communiquer. Et typiquement ma version de l’histoire c’est qu’on a commencé notre relation et en fait j’ai essayé de dire à Sacha je te propose qu’on soit non exclusif sexuellement. Mais c’est pas du tout les termes que j’ai employés parce que j’avais aucun terme dans mon sac à dos rempli de termes. Et du coup je lui ai dit de façon tellement pas claire qu’il l’a pas du tout compris comme ça. Et pour lui on était en couple exclusif. Et du coup quand on s’est retrouvé confronté à des histoires de bah en fait moi j’ai pécho quelqu’un d’autre… Bah en fait moi j’étais ah bah c’est normal c’est ce qu’on avait dit et Sacha il est là genre c’est pas normal c’est pas du tout le cadre de la relation quoi.

17:53

Adèle Ah ouais, ok. C’est marrant parce que moi, je me souviens que quand j’ai aussi débuté… C’est le moment effectivement où je trouve que c’est le plus pertinent et le plus nécessaire d’essayer de communiquer clairement. Mais comme c’est la première fois que tu le fais, tu te trompes. Et du coup, j’étais en relation avec quelqu’un qui s’appelait Jonathan à l’époque. Et en fait, on revenait effectivement sur des règles qu’on avait mises en place avant et on en a discuté et on a vu pareil les aspects de non-vie en commun. C’est-à-dire que je recommençais à vouloir avoir mon espace personnel et à ne pas être en fusion totale avec lui. Je voulais voir mes amis en seul à seul. Je voulais pouvoir effectivement dormir avec d’autres personnes. Et finalement, lui, il était assez OK avec tout ça parce que ça lui allait bien. Donc, on avait trouvé des accords qui étaient confortables. En revanche, ses amis étaient venus vers moi et m’avaient dit « Non, mais tu vas le larguer. Tu n’es plus amoureuse de lui. Qu’est-ce que c’est que ces histoires ? » Et finalement, le cadre qu’on avait dans notre relation, son entourage estimait qu’ils avaient un mot à dire dessus. Donc, c’est aussi, je trouve, intéressant d’avoir conscience du fait que le cadre qu’on définit, normalement il est pour la relation entre deux personnes. Mais finalement l’extérieur a parfois des prises aussi sur ce cadre. En particulier quand on est finalement dans l’exploration et qu’on n’est pas très très sûr de nous. Quand on a un peu des doutes, le monde extérieur s’en saisit et va nous happer un petit peu et bouger un petit peu les limites aussi de ce cadre. Quand bien même, finalement, il va bien aux deux personnes qui sont impliquées dans la relation. Donc voilà, c’était aussi pour dire qu’en fixant le cadre, prenez potentiellement en compte le regard des autres, ou pas. Mais qu’il faut être clair sur à quel point ça peut vous impacter.

19:56

Alexia Après, c’est vrai que tu fixes un cadre dans une relation avec quelqu’un, mais en fait, ça va de fait impacter les autres quand même. Encore une fois, dans ma relation avec Sacha, il y a un moment où j’étais à l’aise avec le fait qu’il puisse accueillir des gens dans notre lit. Et il y a un moment où j’étais dans un moment de grosse insécurité et où je suis revenue là-dessus. Et j’ai demandé à changer ça et à ce qu’on ne puisse plus accueillir des gens dans notre lit. Et en fait… Et ça impacte fort quand même les autres relations de Sacha éventuellement. Ça veut dire qu’une liberté qu’elles avaient avant, d’un coup, au nom de sa relation avec moi, il l’a retirée. Et du coup, il l’a fait parce que vraiment, je n’étais pas bien à ce moment-là. Et puis aussi, je pense qu’on n’a pas su faire autrement. Peut-être qu’il y avait d’autres voies qui auraient été plus justes pour les autres personnes et même pour Sacha. Là, c’est vraiment moi qu’on a protégée. Mais voilà, effectivement, les règles qu’on instaure, ça peut être difficile pour d’autres personnes, en fait.

20:59

Adèle Et du coup, comment vous feriez aujourd’hui ? Si vous deviez mettre en place un cadre, comment vous procéderiez pour faire au mieux justement le point avec vos différents partenaires ?

21:11

Alexia Moi, je ne sais pas trop. Je pense que je ne fais pas clairement de cadre, mais j’ai un petit truc à raconter. Ça s’est passé il y a une semaine. Ce qui se passe, en fait, c’est que je vois souvent mon frère et on doit s’occuper de notre famille, en gros. Et c’est quelque chose qu’on se retrouve à faire régulièrement, tous les deux, et c’est cool comme ça. Et en fait, en discutant avec lui, je comprends que le week-end dernier, on devait s’occuper ensemble de notre famille. Il dit, on arrivera. Je suis là, mais qui ça, « on », tu vois ? Et en fait, il comptait venir avec sa copine. Et il ne m’en avait pas parlé. Et moi, je suis là, mais en fait, je n’ai peut-être pas envie de voir ta copine. Et en l’occurrence, ce n’est pas vrai. Sa copine est adorable et je suis contente de la voir. Mais ça, c’est quelque chose qui me dérange en soi quand je prévois de voir une personne en particulier ou qu’on prévoit de faire quelque chose. Et que cette personne, sans me consulter, invite quelqu’un d’autre à se joindre à nous. Et c’est quelque chose qui est beaucoup fait par des couples. Qui considèrent que c’est entendu que, puisqu’ils sont en couple, où qu’ils aillent, leur partenaire est susceptible de venir avec eux et c’est accepté. Et pour moi, c’est quelque chose avec lequel je ne suis pas à l’aise. Et donc, j’ai demandé à mon frère « Ok, trop cool, je suis très contente de voir ta copine. Mais est-ce que la prochaine fois, tu peux quand même essayer de me consulter à l’avance. Et me demander si c’est OK pour moi parce que peut-être qu’il y aura des moments où ça pourrait me déranger pour X raisons. » Et du coup, je considère que j’ai fixé un petit accord avec mon frère dans le cadre de notre relation. Pour faire attention à comment je me sens et sans le léser lui ou d’autres personnes.

22:48

Adèle Si je comprends bien, en fait, c’est parce que tu constates qu’il y a des choses qui te gênent que tu réussis à formuler finalement des demandes ou à mettre le sujet sur le tapis. Pour dire, en fait, là, il y a besoin qu’on discute d’une nouvelle manière de fonctionner, finalement.

23:03

Alexia Ouais, je pense qu’effectivement, c’est quand il y a quelque chose qui me gêne ou que je sens qu’il peut me gêner et qu’on s’approche de ça.

23:09

Adèle De ton côté, Sacha, tu procèdes comment ?

23:15

Sacha Je pense qu’il y a un petit peu deux manières de gérer le cadre d’une relation. Peut-être une première manière, c’est la manière la plus classique on va dire. Qui est on démarre une relation, même potentiellement monogame avec quelqu’un, mais une relation importante etc. On se met en couple avec quelqu’un disons. Si on se met en couple il y a plein d’attentes qui vont avec et donc du coup c’est important de mettre un cadre dès le début. Et c’est vrai que jusqu’à présent on a beaucoup parlé de spécificité un petit peu du modèle non monogame. Mais tout ce qu’on a dit est complètement valable aussi sur un modèle monogame. Sur le fait que c’est très important de discuter de ce qui est possible de faire au sein du modèle monogame. Puisque on en a déjà parlé, mais… Qu’est-ce qu’on a le droit de faire ? Qu’est-ce que tromper ? À quel moment est-ce qu’on peut embrasser quelqu’un ? Ou même les choses que tu disais tout à l’heure, Adèle, par rapport à pouvoir dormir avec des amis, par exemple. Et il y a plein de gens qui sont dans des couples, ça va les gêner si leur partenaire dort avec des amis. Alors bon, on en pense ce qu’on veut de ça. Mais en tout cas, c’est des choses qui sont importantes. Et donc pour moi, si on se lance dans une relation très engageante avec quelqu’un. Notamment une relation soit monogame, ou même une relation polyamoureuse qui va être très importante en fait… C’est important de se projeter sur tout un tas de situations. Tout un tas de situations, le maximum possible. Alors on ne va pas pouvoir penser à tout. Mais de penser au maximum de choses, notamment les choses que, sociétalement, on se dit qu’on n’a pas le droit de faire. Se dire, est-ce que ça, c’est OK ? Est-ce que c’est OK que je puisse partir en vacances pendant deux semaines avec ma famille sans toi ? Est-ce que c’est OK que je passe en vacances deux semaines avec mes amis sans toi ? Tout ce genre de choses, en fait, qui potentiellement, pour plein de gens, ça va les gêner. Je pense que c’est important d’en parler le plus possible. Oui, plein de petites choses. Qu’est-ce qu’on va faire ? Est-ce qu’on va suivre ce que font tout le monde ? Et même dans ce que font tout le monde, où est-ce qu’on se situe ? Parce qu’en fait, ce que fait tout le monde, ça ne veut pas dire grand-chose. Ça, c’est pour le point d’un cadre d’une relation qu’on a envie de très cadrer, parce qu’on va lui donner, même prescriptivement, on va lui donner beaucoup d’importance. On va dire, OK, je me lance dans cette relation, et cette relation aura énormément d’importance. Ça va être une relation primaire, disons, pour simplifier. Et l’autre cas, c’est des relations dont on discutait un peu plus là, qui sont des relations un peu plus floues, où chacun fait un petit peu ce qu’il veut. Et là, pour moi, il y a déjà d’une part d’essayer de voir comment est-ce qu’on peut faire concorder les envies des gens. Pour voir quel type d’activité on va faire avec cette relation, avec la personne, quel genre de choses. Et pour ça, il y a un concept des anarchistes relationnels, c’est un outil qui s’appelle le smörgåsbord.

25:53

Adèle *Rires* Pardon ! Faudra l’écrire dans les notes de l’épisode parce que je pense que c’est difficile pour nous de visualiser là.

26:02

Alexia Très belle prononciation, Sacha.

26:04

Sacha Smörgåsbord.

26:06

Alexia Ça va, ça va.

26:07

Sacha En français, on dirait smorgasbord.

26:12

Adèle Qu’est-ce que ça veut dire ?

26:13

Sacha C’est un mot suédois qui veut dire table de pain beurré. Et en fait, l’idée…

26:17

Adèle Wow !

26:18

Sacha C’est que c’est un peu un buffet. Enfin, c’est un buffet, clairement. C’est un buffet avec plein, plein, plein de petits plats. Et l’idée derrière cette chose-là, c’est de dire, en fait, moi, j’arrive avec ce buffet. J’ai plein, plein, plein de petits plats. Ces petits plats, c’est, j’ai envie de faire tel sport. J’ai envie d’aller au cinéma. J’ai envie de partager de la sexualité. J’ai envie de faire des câlins, mais sans sexualité. Toutes ces choses-là, c’est des choses qui me vont. Et en face la personne elle peut dire… Ah oui moi je veux bien la sexualité et le cinéma, par contre aller voir ta famille non, et dormir ensemble non plus, ça ça me va pas. Et en fait comme ça on peut se mettre d’accord sur quelle composante on veut dans la relation. Alors après ça peut on peut changer d’avis ou quoi que ce soit mais en tout cas c’est l’idée de customiser complètement sa relation. Et donc soit on le fait au début soit on le fait au fil du temps et on actualise en se disant… Ah bon moi finalement ça j’aime pas trop et puis est-ce qu’on peut essayer tel genre de choses.

27:14

Adèle Oui, j’ai l’impression que c’est quelque chose que je fais beaucoup quand je suis dans une nouvelle relation. Souvent, j’ai plein, plein d’envies qui me viennent et je fais parfois des listes. Et en fait, ça ne se présente pas sous la forme d’un buffet, mais c’est presque pareil. J’ai ma liste et potentiellement, je vais venir proposer ces activités-là ou ces choses à faire à la personne en face. Et soit elle prend, soit elle ne prend pas. Et ce n’est pas grave si elle ne prend pas. Et la personne en face, j’aime bien qu’elle fasse pareil. Donc effectivement, je trouve que c’est une bonne base de partir aussi sur les envies et pas que sur les interdits. Parce que ça permet aussi d’avoir quelque chose de peut-être un peu plus positif. Qui n’est pas que sur des aspects de restriction et de ce qui n’est pas possible de faire dans la relation, mais aussi sur ce qui est possible. Et j’aime bien ce distinguo. Et c’est aussi d’ailleurs pour ça qu’un certain nombre de personnes dans la communauté polyamoureuse préfèrent parler d’accords que de règles sur les cadres de relations. L’idée d’accord, c’est qu’on n’impose pas à l’autre des choses qui ne sont pas possibles ou autres. Mais on discute ensemble pour établir finalement ce qui est possible dans la relation. J’aime bien cet aspect, ça permet d’être un peu plus respectueux sur l’aspect j’accueille le besoin et les limites de l’autre, puis on construit ensemble finalement, brique par brique, ce qu’on veut dans la relation.

28:34

Alexia J’ai l’impression qu’il y a plusieurs mouvements. J’ai l’impression qu’il y a un moment où, dans les communautés polyamoureuses, les gens disaient beaucoup… « Ah, si vous devenez polyamoureux, il faut vraiment que vous ayez vos règles, machin. » Et ils voyaient ça de façon tête figée, ou en tout cas, c’est le terme « règles » qu’ils utilisaient. Et après, il y a eu un mouvement qui disait « Non, mais en fait, les règles, c’est ultra sévère et restrictif, et il faut quelque chose de plus souple, et on va plutôt parler d’accord. » Et du coup, on en revient un peu à la question de qu’est-ce qu’on met derrière les mots. Mais bon, voilà, l’important, c’est de faire attention à tout le monde.

29:10

Adèle Ouais de faire équipe. Et puis nous on vous propose encore un autre mot. Et on vous dit établissez le cadre de votre relation comme ça au moins on met tout le monde d’accord

29:20

Alexia Et Sacha, il sort des mots sortis de son chapeau, là.

29:23

Sacha Ça vient de Suède.

29:26

Alexia On a compris.

29:29

Sacha D’une manière concrète, il y a la question qui se pose de comment est-ce qu’on parle, comment est-ce qu’on expose ses besoins, comment est-ce qu’on demande quelqu’un de remplir ses besoins ? Et bon, il y a la question de la temporalité, donc ça on en a déjà parlé. Ça peut être intéressant d’en parler lors des radars, de se dire « bon ben là j’ai vu que tel besoin que j’ai n’est pas répondu, est-ce qu’on peut s’arranger pour qu’il soit répondu ? » Mais au-delà de la temporalité, il y a la manière de le faire. Notamment, il y a cette idée, il y a un certain nombre de gens qui vont pas forcément oser demander quelque chose. Que ça soit un besoin ou une envie en fait, ils vont pas vraiment oser le faire.

30:06

Alexia On voit Adèle qui se sent concernée là derrière.

30:09

Adèle Tout à fait. J’ai rigolé parce que je me sentais concernée.

30:13

Sacha Et parfois, c’est pour des raisons qui sont presque bonnes, c’est-à-dire qu’il peut y avoir une envie ou un besoin qui est pas forcément très légitime, en fait, d’une certaine manière. Un exemple concret, c’est que, par exemple, certaines personnes vont ouvrir leur relation, mais des gens vont se dire… Il y a une des personnes qui va se dire « Moi, en fait, j’ai pas très envie que mon/ma partenaire, elle couche avec quelqu’un d’autre, par exemple. » Et mettre une limite qui, éventuellement, va être asymétrique. Et de dire « Moi, je veux bien explorer un peu la sexualité avec d’autres gens, mais ça me ferait vraiment trop de mal si mon ou ma partenaire le faisait, en tout cas aujourd’hui. » Et donc, demander à ce qu’on procède de cette manière-là, c’est pas juste, on est d’accord. Et du coup, c’est un peu illégitime, ça serait illégitime de demander ça. Et donc, des personnes vont se dire « Bon, moi, en fait, finalement, c’est ça que j’aimerais bien faire dans un premier temps, et après, comme ça, on pourra évoluer. Mais du coup, je le demande pas parce que je considère que c’est pas juste. » Or, en fait, il est possible de tout demander à partir du moment où la personne en face est capable de pouvoir dire non en toute simplicité. Et donc si on se met dans un contexte qui permet à la personne en face d’entendre cette envie, ce besoin, et de pouvoir ensuite dire non sans que ça n’ait de conséquences derrière… Il est possible de demander, finalement, n’importe quoi. De demander n’importe quoi, et ensuite de pouvoir que la personne en face dise non, bah effectivement, ce que tu dis, je trouve ça un peu trop injuste… Enfin sans avoir à se justifier d’ailleurs, et de dire non.

31:48

Adèle Oui, d’ailleurs, je rebondis là-dessus. Moi, je pense que mes amis m’ont beaucoup aidée à fixer des meilleurs cadres dans mes relations d’une manière générale. Parce que c’est des personnes auprès desquelles j’étais beaucoup plus honnête sur mes besoins réels et sur mes limites réelles. En tout cas, au début de mon exploration de la non-monogamie. Parce que j’acceptais effectivement qu’ils puissent me dire non systématiquement. Et donc, j’allais plus facilement vers eux pour faire mes demandes. Et finalement, il y avait bien souvent des personnes qui me disaient « ça, je ne peux pas le faire… comme tu me le demandes. Par contre, je peux te proposer quelque chose d’autre » auquel moi, je n’avais pas forcément songé et qui finalement répondait aussi bien à mon besoin. Et ça m’a permis vraiment d’avancer aussi et de voir que je pouvais me reposer sur mon entourage et que mes demandes étaient acceptables. Et qu’en fait, il n’y a quasiment jamais une seule fois où on m’a dit mais qu’est-ce que tu racontes ? C’est totalement délirant ce que tu dis et jamais personne ne va accepter ça. Et ça suppose d’avoir des amis respectueux et qui savent effectivement communiquer. Mais moi, ça m’a vraiment beaucoup, beaucoup aidée dans le fait de me respecter et faire mes demandes. Et aujourd’hui, j’ai l’impression que j’établis beaucoup mieux le cadre dans mes relations grâce à ça. Donc merci à tout mon entourage exceptionnel.

33:10

Alexia Moi, j’ai eu un petit truc qui s’est passé à un moment qui est… D’abord, je veux dire que, effectivement, comme dit Sacha, présenter un besoin, faire une demande, c’est un peu éventuellement culpabilisant. Demander à établir une règle ou je sais pas quoi, en fait, on se dit est-ce que je suis légitime à demander à se qu’on fasse des efforts pour moi. Alors je fais un peu mon caliméro, mais ça peut être culpabilisant. Et dire non, ça peut être culpabilisant aussi, ou dire stop, ou dire là c’est ma limite. C’est ultra culpabilisant, genre pour certaines personnes. Et ce qui m’est arrivé à moi, c’est qu’il y a un moment où il y a quelqu’un qui m’a mis une limite. Et en fait, l’effet que ça a fait, c’est que ça m’a rassurée. Parce que je me suis dit, en fait, cette personne est capable de me dire ses limites et besoins. Et du coup, je peux juste l’écouter et je sais que je ne vais pas outrepasser ses limites, qu’elle ne va pas me laisser faire quelque chose que je ne veux pas faire, en fait. Et aussi, ça m’a permis de me dire, si cette personne met ses limites et dit, non, là, ce n’est pas possible pour moi. Ça veut dire qu’elle saura entendre que parfois, ça sera pas possible pour moi non plus. Et du coup, il y a un petit truc d’exemplarité, je trouve, de savoir, malgré le fait que c’est un peu culpabilisant… Mais faire une demande, dire non, en fait, c’est bon pour tout le monde, de se respecter soi-même. C’est débile, mais…

34:30

Sacha Et d’ailleurs, une pratique qui peut être très bonne à faire, c’est quand quelqu’un nous dit non, de dire… « Merci de m’avoir dit non, merci de t’être écouté·e, et merci de me dire quand est-ce que t’es pas d’accord. »

34:41

Alexia Oui, complètement, ouais.

34:44

Adèle Oui, j’ai eu le même vécu que toi, Alexia. En fait, on sent que quand l’autre veut faire équipe et qu’elle nous dit non, ce n’est pas forcément du rejet. On a trop tendance à penser que c’est du rejet quand quelqu’un nous dit non, alors qu’en fait, pas du tout. Et ça peut, au contraire, être une main tendue pour que chacun se respecte mieux dans leur relation. Moi aussi, je suis assez contente de ça, même si… Parfois, on a aussi une forme de déception quand quelqu’un nous dit non, mais on apprend à mieux vivre avec et ça se passe bien.

35:19

Sacha L’idée, quand on fait une demande, c’est que c’est une demande, c’est pas une exigence. Et en face, ce qui est nécessaire, c’est que cette demande, elle soit entendue. Ça, c’est nécessaire. C’est qu’elle soit entendue, mais pas qu’elle soit comblée. Alors c’est bien si elle est comblée. Et c’est bien si la personne qui ne peut pas la combler nous aide éventuellement à nous proposer autre chose.

35:39

Alexia Mais c’est aussi très bien si la personne elle met ses limites.

35:43

Adèle Oui. Et c’est bien aussi si elle permet que, du coup, cette demande qu’on a faite, elle ne soit pas répondue auprès d’elle, mais potentiellement qu’on puisse aller explorer le fait de le faire répondre par quelqu’un d’autre. C’est clair que si la personne nous met des limites strictes sur nos comportements et ne peut pas répondre aux besoins et n’accepte pas qu’on puisse répondre aux besoins, bon, là, c’est un peu plus compliqué.

36:03

Sacha Oui, et puis après, c’est la personne qui reçoit la demande qui peut aussi devenir créative et proposer autre chose. Si, disons, exemple concret, quelqu’un dit « Ah oui, moi, j’aimerais qu’on parle par message toutes les heures »… La personne dit en face « Ah non, moi, toutes les heures, c’est trop, mais est-ce que, par exemple, si je t’envoie un vocal toutes les quatre heures, ça te va ? » Voilà, trouver des moyens ensemble qui font que ça convienne.

36:27

Adèle Oui, oui, complètement.

36:29

Sacha Je voulais juste faire un petit point d’attention, parce que là, on parlait de, oui, la communication, c’est bien, quand on communique bien, tout se passe bien, etc. Il y a quand même un point de vigilance sur le fait qu’il y a des gens qui ne savent pas ou ne veulent pas communiquer bien. Par exemple, on parlait tout à l’heure de dire, ah oui, personne ne m’a jamais dit, ah non, cette demande est inacceptable. Il existe des gens qui, si on leur dit, ah, est-ce que tu peux m’appeler tous les soirs à 20 heures… La personne dit comment ça mais tu t’es pris pour qui etc. Il y a des gens qui peuvent réagir comme ça c’est une très très très mauvaise réaction. Mais si vous relationnez notamment avec des gens qui ont un très mauvais caractère, qui sont toxiques potentiellement… Le fait de vous exposer, en plus en demandant des besoins, il peut y avoir un danger que cette personne réagisse extrêmement mal parce qu’elle est toxique. Ce que je veux dire par là c’est que les conseils qu’on donne là ils sont valables dans une relation où tout le monde est de bonne volonté. Mais si les gens sont pas de bonne volonté ça peut être un petit peu dangereux d’une certaine manière. Ou aussi le fait de pouvoir demander n’importe quoi si la personne est capable de dire non en face… Il faut vraiment s’assurer que la personne est capable de dire non en face. Si je sais que je suis avec quelqu’un qui a vraiment beaucoup du mal à dire non, je vais pas lui dire… « Ah tiens, j’ai pas beaucoup d’argent ce mois-ci, est-ce que tu peux me donner mille euros ? » Comme ça, et si la personne, elle sait pas dire non…

37:39

Alexia Là, on touche même à des questions de consentement.

37:41

Sacha Oui.

37:42

Alexia Qui sont hyper importantes. En fait, il faut avoir conscience de tout un tas de dynamiques dans la relation, de dynamiques de privilèges, de dynamiques d’insécurité ou de choses comme ça. Et quand on fait une demande, effectivement, il faut avoir conscience du fait que la personne en face, elle nous répond comme on peut. Et en fait, éventuellement, elle ne peut pas nous répondre de la façon dont elle devrait nous répondre. Sacha, tu connais le sujet mieux que moi, je pense. Toi, tu as fait des gros ateliers sur s’assurer du fait qu’on se retrouve sur un vrai consentement.

38:14

Sacha Oui, après, il y a tout un tas de techniques qui sont intéressantes pour essayer d’obtenir un consentement le plus libre, éclairé possible. Par exemple, le fait de plutôt que dire « est-ce que ça t’irait que… quelque chose. » Dire…

38:26

Alexia Ouais, comment tu formules le truc ?

38:27

Sacha C’est ça, de laisser la personne revenir, par exemple, de dire… Bon, moi, j’aimerais bien qu’il se passe ça, si jamais, toi, ça te va aussi, reviens vers moi, prends le temps et reviens vers moi. Et comme ça, le non est implicite, la personne n’a rien à faire pour dire non, tout va bien. Mais par contre, il faut qu’il y ait un effort actif de sa part, plus tard, de revenir pour dire oui. Et là, du coup, ça aide quand même beaucoup plus à ce que le oui soit vraiment sincère. Alors, ça ne protège pas de tout, évidemment. S’il y a des gros biais de pouvoir ou que la personne, elle veut vraiment être reconnaissante de quelque chose ou…

38:59

Alexia Mais du coup, c’est comme si on mettait la personne en face en situation de non par défaut, quoi. « Moi, j’aurais cette demande, je considère que c’est non, mais si tu veux bien, tu viens vers moi. »

39:15

Adèle Comment on peut faire si jamais le cadre ne fonctionne pas ou ne fonctionne plus ?

39:21

Alexia Je le plaque. Non, je ne sais pas trop. C’est une question un peu difficile, ça.

39:28

Sacha La première étape, déjà, c’est de s’en rendre compte qu’on n’est pas satisfait avec le cadre. Et la seconde étape, c’est d’en parler et de dire je ne suis pas satisfait, satisfaite par ce cadre. Et après, il y a la troisième étape de comment on résout. Mais déjà, il faut commencer par ces deux premières-là.

39:44

Adèle Est-ce que tu as des exemples de situations où tu t’es rendu compte que quelque chose ne fonctionnait pas et qu’il fallait absolument en discuter ? C’était aussi évident que les étapes que tu viens de décrire ou c’était un peu plus compliqué que ça ?

39:55

Sacha Par exemple, j’ai une relation où on voulait se voir toutes les semaines à peu près, éventuellement deux fois par semaine. Et du coup, on devait sans cesse trouver des moments où se voir et se dire, bon, là, est-ce qu’on se voit jeudi ? Est-ce qu’on se voit tel jour ? Et donc, il y avait tout ce côté logistique qui pouvait être déjà éventuellement un petit peu pénible. Mais surtout, ça créait éventuellement après des frustrations qui étaient que, ah bah non, tel jour, on ne peut pas. Finalement, dans cette semaine, il n’y a plus aucun créneau libre. Et du coup, on ne se voyait pas. Et du coup, ça pouvait créer des frustrations d’une des personnes qui pouvait dire, ah mais on ne se voit pas assez. L’autre qui dit, bah oui, mais l’agenda, il est comme ça, etc. Et donc, se rendre compte qu’on n’est pas si satisfait avec la quantité de temps qu’on passe ensemble, d’une part. Et la manière dont on arrive à s’allouer cette quantité de temps. Et ce n’était pas quelque chose qui était gravissime. C’était quelque chose d’un peu pénible et qui risquait de poser d’autres problèmes éventuellement derrière.

40:52

Adèle C’était plus sur les aspects où la logistique de la relation vous prenait beaucoup d’énergie et ça devenait frustrant.

41:00

Sacha Oui, ça oui, et puis la frustration du fait du coup de dire parfois on se voit pas assez parce que là cette semaine on n’a pas pu et du coup on se voit pas assez, etc. Et ce qui s’est passé c’est qu’on s’est dit bon, et si on changeait complètement la manière dont on se voyait et qu’on se dit à la place, voyons-nous tous les mardis soir. Et en plus de ça, on peut se voir un petit peu d’autres moments, et puis on peut annuler certains mardis, etc. Mais changer complètement la manière dont on fonctionnait jusqu’à présent. Et de dire maintenant on se voit tous les mardis soirs, comme ça on est à peu près garantis de se voir une fois par semaine. Parfois ça va s’annuler, c’est pas grave. Mais on part de cette base-là, déjà ça nous fait qu’on n’a plus besoin de réfléchir là-dessus. Et en plus on a un petit peu cette base du fait qu’on va se voir à cette fréquence-là.

41:47

Adèle De mon côté, dans une de mes relations, je pense que je me suis rendue compte que le cadre ne fonctionnait plus. C’est-à-dire qu’il y avait des moments de crispation. Où finalement, on ne profitait plus trop des moments ensemble parce qu’à chaque fois, nos besoins et nos limites respectives entraient un peu en conflit. Et en fait, m’en rendre compte et essayer d’en discuter, ça n’avait pas suffi à permettre de revoir le cadre et à trouver des solutions pour que ça se passe mieux. Et… Je pense que dans ces moments-là, moi, il m’est assez difficile de prendre le recul nécessaire pour me dire… En fait, cette relation, elle t’apporte plus grand-chose, c’est très compliqué à gérer pour vous deux. Est-ce que vous gagneriez pas à moins vous voir ou à peut-être même mettre fin à la relation. Et en l’occurrence, du coup, la relation s’est dégradée avec le temps et on a fini par arrêter la relation. Et en fait, le fait d’arrêter la relation, ça nous a permis de ne plus avoir tout cet ensemble de règles et le cadre a été revu de fait, vu qu’on a dit stop. Et j’ai l’impression que suite à ça, alors il a fallu un temps de deuil, mais on a pu commencer à reconstruire une autre relation qui nous va beaucoup mieux, sur des bases beaucoup plus saines.

43:17

Alexia C’est fou, c’est… C’est comme si, en gros, votre… Du coup, juste avec l’étiquette de relation, c’est venu avec des attentes que vous vouliez pas par ailleurs, mais vous arriviez pas à les défaire.

43:27

Adèle Ouais, je sais même pas si c’est ça ou si c’est par des aspects d’habitude où, en fait, pour le coup, initier le changement était vraiment très compliqué. On n’arrivait pas à trouver quelque chose qui nous convenait parce que je pense qu’on avait l’historique des besoins que l’autre nous avait formulés, qu’on avait du mal à gommer.

43:46

Alexia Le changement d’étiquette, ça a fait une sorte de reset.

43:49

Adèle Ouais, c’est ça. Je me souviens que, suite à ça, j’en ai rediscuté avec cette personne. Et en fait, elle me dit « Bah oui, mais je pensais, parce que tu m’avais fait cette demande peut-être cinq mois avant, que t’en avais encore besoin. Du coup, je cherchais à y répondre. » Et je lui dis « Bah oui, mais en fait, moi, à ce moment-là, j’en avais plus besoin, vu que c’était pour répondre à une insécurité que j’avais avant. Et du coup, je voulais pas que tu t’imposes ce comportement. » Et elle dit « Bah oui, et d’ailleurs, moi, je me l’imposais. Du coup, c’était pénible et j’en pouvais plus. » Et en fait… Il y a des moments où, malgré toute la bonne volonté du monde et la communication, on entre dans des schémas qui peuvent être un peu trop figés et qui ne correspondent plus du tout à la situation. C’est très difficile d’envisager des ruptures. Moi, ça ne me plait pas du tout. Ce n’est pas quelque chose que j’ai envie de faire d’une manière générale. Je ne vous incite pas à rompre nécessairement dès qu’il y a un problème. Ce que je veux dire par là, c’est que… C’est aussi OK parfois de se dire, en fait, la relation, elle ne fonctionne plus en l’état. Il faut vraiment la revoir. Il faut retirer toutes les étiquettes et rebattre les cartes totalement. Ou alors revenir un petit peu à ce qu’on disait tout à l’heure, à savoir, en fait, qu’est-ce qui nous plait dans la relation et qu’est-ce qu’on a envie de garder ? Est-ce qu’on peut revenir et peut-être faire chacun une liste de ce qu’on veut vraiment dans la relation et de ce qu’on ne veut vraiment pas dans la relation ? Et je pense que j’aurais aimé avoir cette démarche-là à ce moment-là. Et je n’ai pas réussi à la mettre en œuvre. Et ça aurait été pourtant, je pense, la bonne solution qui aurait peut-être permis d’éviter qu’on en passe par une phase de rupture. Vous, est-ce que ça vous est déjà arrivé d’avoir ce constat que la relation ne fonctionne pas, que vos besoins, vos limites sont plus respectés et qu’il faut vraiment revoir totalement le cadre ?

45:40

Alexia Moi, non, parce que j’ai un super pouvoir en déni. Et du coup, quand quelque chose ne va pas, je ferme les yeux et je fais « non, tout va bien ». Et je pense que ça me dessert parfois. D’autres fois, ça m’aide beaucoup. Par exemple, quand je me fais plaquer, je fais du déni. Je suis là genre « non, c’est pas vrai ». Et je rigole, mais c’est à la fois un conseil tout à fait toxique et à la fois une véritable astuce. Qui me permet de ne pas avoir l’impression que mon monde s’effondre. Mais de me dire qu’il y a un changement, mais on n’est pas sûr de ce que ça va être. Et le temps que mon cœur s’habitue au fait que c’est peut-être une fin de relation, ça fait un peu un tampon. Et même dans les relations, parfois il y a des choses qui ne vont pas, mais… J’ai du mal à me dire vraiment, ça ne va pas au point qu’il faut arrêter la relation. Pour l’instant, ça ne va pas, mais ça reviendra à un moment. Je pense que je m’invente beaucoup d’excuses du genre, c’est parce que moi, je ne vais pas bien, c’est parce que la personne en face ne va pas bien. Et je n’ai pas été encore dans un contexte où je me suis dit, non, vraiment, là, ça ne fonctionne pas, où j’ai vu ça en face. Et je ne sais pas si pour le coup, ça ne m’est jamais arrivé ou si vraiment, j’ai fait preuve de déni.

46:55

Sacha Sauf quand tu m’as quitté, quoi.

46:58

Alexia Alors là, c’est super intéressant parce que c’est exactement de ce dont on parlait tout à l’heure. C’est qu’il y avait plein d’attentes et de choses qui étaient dans notre relation. Et en fait, moi, je n’arrivais pas à savoir ce que je voulais. Et le fait de partir, ça m’a permis de me dire « Ok, là, je ne dois rien à personne. Je suis célibataire. J’ai été claire là-dessus. » Et là, j’ai fait « Qu’est-ce que je veux ? » Et j’ai fait « En fait, j’ai envie d’être avec Sacha. »

47:25

Adèle Mouah !

47:26

Alexia C’est nul et je suis désolée Sacha d’ailleurs de t’avoir fait vivre ça. Mais c’était hyper important pour moi parce que je n’arrivais pas à savoir ce que je voulais moi-même ou ce que j’avais l’impression d’être obligée de vouloir.

47:38

Adèle Oui, je pense que c’est effectivement un conseil assez sain de se dire finalement quand ça ne va pas, prendre un temps pour se recentrer et se demander qu’est-ce qu’on veut.

47:47

Alexia Et plaquer l’autre !

47:48

Adèle Ça peut être un bon point de départ derrière, même qui bénéficiera à la relation. Parce que quand on ne s’écoute pas, on a beaucoup plus de chances d’arriver à une forme d’épuisement relationnel ou à une forme de… Où on va se laisser envahir sur nos limites et où, on l’a vu lors du dernier épisode, généralement, ça se passe pas bien quand on procède de cette manière-là pour personne, quoi.

48:12

Alexia Ouais, c’est clair. Nous, Adèle, d’ailleurs, on a eu un peu ce truc-là où on a vraiment voulu faire hyper attention aux besoins de l’autre. Et en fait, on n’arrivait pas à, nous, faire attention à nos propres besoins dans notre relation. Et c’est nul. On s’est vraiment foirées là-dessus, quoi.

48:27

Adèle Oui, carrément. Comme quoi, ça arrive de se foirer. Même quand les deux personnes ont la volonté que l’autre soit dans la meilleure position possible, ça fait un espèce de cercle vicieux où personne ne s’y retrouve. Je pense que ce qui nous a tiré de ça, c’est effectivement déjà une très bonne communication entre nous qui a permis qu’on se dise qu’on s’aime très fort, mais…

48:50

Alexia On voit qu’il y a un problème.

48:51

Adèle C’est compliqué, on n’y arrive pas. Et qu’on prenne, encore une fois, à une période, au moins un moment, une petite distance. Pour refaire le point chacune et voir ce qu’on avait envie de faire dans la relation. Et pouvoir se dire « Ok, on existe même sans l’autre et on ne peut pas faire que centrer nos vies respectives sur l’autre. » Bien sûr, tout ce qu’on dit, encore une fois, je réitère les petits conseils de Sacha ou plutôt le petit avertissement de Sacha au préalable. Ces aspects-là, encore une fois, ils présupposent que les deux personnes sont de bonne volonté et ça ne marche pas bien avec une personne qui est toxique. Pour le coup, ça m’est arrivé de voir que le cadre ne fonctionnait pas. Et d’avoir beaucoup d’injonctions très toxiques et presque de la manipulation de la part de mon partenaire en face pour finalement que je respecte ce que lui voulait. Dans ce genre de situation, je pense qu’il n’y a pas d’autre solution, malheureusement, que de couper le contact ou de mettre une distance vraiment très nette. D’être très solide sur ses appuis et sur ses limites. Ce qui peut être difficile avec une personnalité toxique. Donc là-dessus, prenez soin de vous, surtout, et faites attention à ces aspects.

50:11

Alexia Et même sans parler de personnalité toxique, je trouve que c’est quelque chose d’un peu difficile à manœuvrer comme concept. Mais en fait, juste si vous avez l’impression que la personne, elle ne fait pas équipe avec vous, ça ne peut pas marcher en fait. C’est vraiment pour moi ce truc de faire équipe et d’être à deux et de se dire en fait, on a tous les deux des besoins et on essaie de faire attention ensemble aux besoins de chacun.

50:32

Sacha En plus, je pense que c’est un petit peu dangereux de parler de personnalité toxique, parce que… Bon, peut-être qu’il y a certaines personnalités qui sont vraiment toxiques avec tout le monde… Mais plus exactement, c’est une relation qui va être toxique. Alors parfois, c’est clairement la faute de quelqu’un, mais…

50:44

Adèle Ou des comportements.

50:46

Alexia C’est ça.

50:46

Adèle Plutôt les comportements, effectivement, je me suis mal exprimée.

50:49

Alexia Et moi, je considère que j’ai été toxique avec Sacha à un moment. Enfin, j’ai été toxique avec toi aussi, Adèle. Je suis parfaitement toxique.

50:54

Adèle Tu as eu des comportements toxiques. Tu n’étais pas toxique. Attention, le vocabulaire.

50:59

Alexia Et en fait, c’est hyper important de faire ça parce qu’en fait, vous avez en face de vous quelqu’un qui, à priori, essaie de faire de son mieux. C’est pas pour autant que cette personne ne peut pas avoir de comportements qui sont toxiques et desquels il faut se méfier.

51:14

Adèle Oui, et ça me permet aussi d’évoquer quelque chose que je trouve intéressant. En fait, dans une relation, d’une manière générale, on a envie de respecter l’autre, on a envie de se respecter soi, on a envie de se faire confiance et de faire confiance à l’autre. Et c’est un peu la base nécessaire à toute relation. Mais il ne faut pas être dans un excédent de confiance sur le fait que l’autre gère absolument tout, va tout bien communiquer, va tout bien faire. Ni que soi-même, on est capable de ça tout le temps. Il y a des périodes où on est moins lucide. Il y a des périodes où on a moins d’énergie. Et où on n’est pas capable de mettre en place tous les conseils ou les modes d’emploi qu’on a donnés. Où on ne va pas faire attention à la formulation dans nos demandes, où on va être beaucoup plus exigeant. Et c’est bien aussi de savoir que ça peut arriver. Et que dans ces cas-là, peut-être qu’il faut un peu temporiser, encore une fois. Et prendre du recul pour retrouver ses moyens et être capable d’avoir une meilleure discussion plus tard.

52:13

Sacha Oui, et c’est pas parce qu’on sait comment agir qu’on va y arriver, effectivement. Dans le podcast Multiamory… Bon, peut-être que ces dernières années, ils ont un peu évolué. Mais en tout cas, sur certains épisodes, il y a un certain nombre d’années, ils disaient… « Oui, moi, je sais, on en parle toutes les semaines dans le podcast de comment il faut bien réagir dans les relations. Mais moi, en pratique, ça se passe très mal. » Et notamment, une des personnes qui disait… « Moi, j’ai 2 relations en ce moment. Il y en a une avec qui je fais le podcast et une avec qui je ne fais pas le podcast. Celle avec qui je ne fais pas le podcast, il y a plein de trucs que je gère très mal avec elle. Mais celle avec qui je fais le podcast, je me rends compte beaucoup plus qu’en fait, je ne peux pas faire n’importe quoi. Parce que je sais que je suis censé savoir comment réagir correctement. Et donc, du coup, je me permets moins de faire n’importe quoi. » Mais ce n’est pas parce qu’on connait les outils et qu’on sait comment il faut réagir qu’on y arrive in fine.

53:01

Alexia Il y a un truc aussi qui me vient en tête à propos des règles et tout. Où on dit que c’est important de prendre le temps de discuter des besoins de chacun et de trouver la juste mesure et tout. En fait, il y a aussi des moments, je pense, dans la vie où on n’a pas le temps. On n’a juste pas le temps de discuter… C’est difficile de prendre beaucoup de temps pour discuter de plein de choses. Je pense vraiment aux parents avec des enfants en bas âge, par exemple. Ça a l’air absolument épuisant pour peu qu’ils travaillent en plus ou qu’il faut s’occuper des parents ou je ne sais pas quelle galère en plus. Il y a des moments, j’imagine, que mettre des règles qui sont un peu simplistes, qui sont un peu rigides, mais ça peut être justifié parce qu’on ne peut pas faire mieux aussi. Nous, on est là à discuter plein. Mais c’est un vrai privilège aussi d’avoir beaucoup de temps. Après, il ne faut pas sortir l’excuse de « je n’ai pas le temps de communiquer » parce que c’est quand même hyper important. Mais bon, ça arrive d’avoir moins de temps possible, quoi.

53:56

Sacha Je suis d’accord avec toi que parfois ça peut être intéressant du coup de faire des règles assez grossières pour essayer de s’en sortir. Mais à contrario dans ce que tu disais, l’exemple. Moi ce que ça m’évoquait plutôt c’est si on n’a pas le temps de parler de situations problématiques etc., en fait l’impératif c’est de trouver ce temps. Parce que s’il y a quelque chose qui ne va pas et qui est grave et qui en plus menace la relation, c’est important de dégager ce temps. Alors effectivement parfois c’est presque impossible. Mais en fait, d’arriver à dégager ce temps plutôt que laisser s’envenimer une situation qui va pas et où en plus on se rend compte clairement que ça va pas.

54:29

Alexia Après, c’est du cas par cas, mais je pense qu’il y a des situations dans lesquelles les règles aussi critiquées soient-elles, parfois, ça peut quand même être une béquille.

54:45

Adèle L’épisode touche déjà à sa fin. Aujourd’hui, on vous a présenté ce qu’est le cadre de la relation. C’est-à-dire le périmètre de la relation, défini en fonction des envies, des besoins et des limites de chaque personne impliquée dans la relation. Parfois, il est nécessaire de l’établir, car ce cadre permet de définir ce qui semble pouvoir fonctionner dans la relation, dans le respect de soi-même et de l’autre. Ensuite, on vous a partagé un mode d’emploi pour le mettre en place. Et on vous a donné nos conseils pour revoir le cadre de la relation ou l’arrêter quand des besoins et limites entrent en conflit avec votre partenaire d’une manière inconciliable. On aimerait aussi que vous reteniez que poser un cadre ne veut pas dire s’enfermer dedans. Il peut être révisé. L’idée est de se sentir bien et de respecter son partenaire.

55:29

Sacha Aussi, retenez que toute demande est légitime tant qu’elle est exprimée dans un contexte où il est possible pour l’autre de dire non.

55:37

Alexia N’oubliez pas que quand vous passez un accord ou vous instaurez une règle avec un ou une partenaire… C’est vrai que c’est quelque chose qui vous concerne en premier lieu. Mais ça peut aussi impacter d’autres personnes autour, surtout dans les relations non monogames. Et il ne faut pas oublier ça non plus. Merci d’avoir écouté cet épisode jusqu’au bout. S’il vous a plu, n’hésitez pas à en parler autour de vous. Ce podcast en est à ses débuts, et on est avides de vos retours, n’hésitez pas à nous envoyer un mail sur contact@atesamours.fr et on se fera un plaisir de vous répondre. Vous pouvez trouver le transcript et les sources de cet épisode sur notre site atesamours.fr. À bientôt pour le prochain épisode !